Javascript Menu by Deluxe-Menu.com fable de La Fontaine Le cochet, le chat et le souriceau fable Jean de La Fontaine : Le cochet, le chat et le souriceau
portrait de Jean de La Fontaine le corbeau de la fable jardin de la maison natale actuellement le perron de l'entrée de la maison
Fable de JEAN DE LA FONTAINE : 
Le Cochet, le Chat et le Souriceau.  Livre VI, fable 5   
 

 LE COCHET (1), LE CHAT ET LE SOURICEAU

Un souriceau tout jeune, et qui n'avait rien vu, (2)
            Fut presque pris au dépourvu.
Voici comme il conta l'aventure à sa mère.
J'avais franchi les monts qui bornent cet État
            Et trottais comme un jeune Rat
            Qui cherche à se donner carrière,(3)
Lorsque deux animaux m'ont arrêté les yeux ;
            L'un doux, bénin et gracieux,
Et l'autre turbulent et plein d'inquiétude.
            Il a la voix perçante et rude ;
            Sur la tête un morceau de chair,
Une sorte de bras dont il s'élève en l'air,
            Comme pour prendre sa volée ;
            La queue en panache étalée.
Or c'était un Cochet dont notre Souriceau
            Fit à sa Mère le tableau,
Comme d'un animal venu de l'Amérique.
Il se battait,dit-il, les flancs avec ses bras,
            Faisant tel bruit et tel fracas,
Que moi, qui grâce aux Dieux de courage me pique, (4)
            En ai pris la fuite de peur,
            Le maudissant de très bon coeur.
            Sans lui j'aurais fait connaissance
Avec cet Animal qui m'a semblé si doux.
            Il est velouté comme nous,
Marqueté, longue queue, une humble contenance,
Un modeste regard, et pourtant l'oeil luisant :
            Je le crois fort sympathisant
Avec Messieurs les rats ; car il a des oreilles
            En figure aux nôtres pareilles.
Je l'allais aborder, quand d'un son plein d'éclat
            L'autre m'a fait prendre la fuite.
 Mon fils, dit la souris, ce doucet (5) est un Chat,
            Qui sous son minois hypocrite,
            Contre toute ta parenté
            D'un malin vouloir est porté.
            L'autre animal tout au contraire,
            Bien éloigné de nous malfaire, (6)
Servira quelque jour peut-être à nos repas.
Quant au chat, c'est sur nous qu'il fonde sa cuisine.(7)
            Garde-toi, tant que tu vivras,
            De juger des gens sur la mine.



Source de la fable : l'italien Verdizzotti essentiellement.

Chamfort écrit dans Les Trois Fabulistes : "Voici encore une de ces fables qui peuvent passer pour un chef-d'oeuvre [...] Pas un mot de trop dans toute la fable, et pas une seule négligence.

(1) petit coq
(2) qui n'avait aucune expérience de la vie
(3) au XVIIème, ce mot désigne un trajet, un parcours
(4) me vante
(5) diminutif de doux, avec une nuance de niaiserie et d'hypocrisie
(6) faire du mal
(7) qu'il se base pour trouver de quoi vivre

le cochet, le chat et le souriceau, Auguste Dellierre (coll. musée)

Aquarelle d'Auguste Delierre (1829-1891)
© Musée Jean de La Fontaine
(cliquer pour agrandir)

 

 

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