Javascript Menu by Deluxe-Menu.com fable Jean de La Fontaine : Le Mari, la Femme, et le Voleur
portrait de Jean de La Fontaine le corbeau de la fable jardin de la maison natale actuellement le perron de l'entrée de la maison
Fable, Jean de La Fontaine, 
Le Mari, la Femme et le Voleur,  LivreIX, fable 15
 

Le Mari, la Femme, et le Voleur

               Un Mari fort amoureux,
               Fort amoureux de sa Femme,
Bien qu'il fût jouissant (1) , se croyait malheureux.
          Jamais œillade de la Dame,
          Propos flatteur et gracieux,
          Mot d'amitié, ni doux sourire,
          Déifiant (2) le pauvre Sire,
N'avaient fait soupçonner qu'il fût vraiment chéri.
          Je le crois, c'était un mari.
          Il ne tint point à l'hyménée
          Que content de sa destinée
          Il n'en remerciât les Dieux ;
          Mais quoi ? Si l'amour n'assaisonne
          Les plaisirs que l'hymen nous donne,
          Je ne vois pas qu'on en soit mieux.
Notre épouse étant donc de la sorte bâtie,
Et n'ayant caressé son Mari de sa vie,
Il en faisait sa plainte une nuit. Un Voleur
          Interrompit la doléance.
          La pauvre femme eut si grand'peur
          Qu'elle chercha quelque assurance
          Entre les bras de son Époux.
Ami Voleur, dit-il, sans toi ce bien si doux
Me serait inconnu. Prends donc en récompense
Tout ce qui peut chez nous être à ta bienséance (3) ;
Prends le logis aussi. Les voleurs ne sont pas
          Gens honteux, ni fort délicats :
Celui-ci fit sa main. J'infère de ce conte
          Que la plus forte passion
C'est la peur : elle fait vaincre l'aversion,
Et l'amour quelquefois ; quelquefois il la dompte ;
          J'en ai pour preuve cet amant (4)
Qui brûla sa maison pour embrasser sa Dame,
          L'emportant à travers la flamme.
          J'aime assez cet emportement ;
Le conte m'en a plu toujours infiniment :
          Il est bien d'une âme Espagnole,
          Et plus grande encore que folle.


 

Sources : Pilpay Le Livre des lumières (p; 259-260) ; Camerarius (fable 387) Le vieillard et sa toute jeune femme. Dans ces 2 cas, les défauts du mari sont à l'origine de l'indifférene de la jeune femme

 

 

 

 

 

 

(1) Bien qu'il Jouît des droits du mariage
(2) le faisant égal aux dieux
(3) tout ce qui te convient
(4) Le comte de Villa Mediana provoqua un incendie pour prendre la reine d'Espagne dans ses bras (Historiettes, Tallemant des Réaux)

illustration Tony Johannot : Le mari, la femme et le voleur
Illustration : Tony Johannot

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