Javascript Menu by Deluxe-Menu.com fable Jean de La Fontaine : La querelle des Chiens et des Chats et celle des Chats et des Souris
portrait de Jean de La Fontaine le corbeau de la fable jardin de la maison natale actuellement le perron de l'entrée de la maison
Fable, Jean de La Fontaine, 
La querelle des Chiens et des Chats et celle des Chats et des Souris,  Livre XII, fable 8
 

LA QUERELLE DES CHIENS ET DES CHATS
ET CELLE DES CHATS ET DES SOURIS

La Discorde a toujours régné dans l'univers ;
Notre monde en fournit mille exemples divers :
Chez nous cette Déesse a plus d'un tributaire.
               Commençons par les éléments:
Vous serez étonnés de voir qu'à tous moments
               Ils seront appointés contraire (1).
               Outre ces quatre potentats,
               Combien d'êtres de tous états
               Se font une guerre éternelle ?
Autrefois un logis plein de Chiens et de Chats,
Par cent arrêts rendus en forme solennelle,
               Vit terminer tous leurs débats.
Le Maître ayant réglé leurs emplois, leurs repas,
Et menacé du fouet quiconque aurait querelle,
Ces animaux vivaient entre eux comme cousins ;
Cette union si douce, et presque fraternelle,
               Édifiait tous les voisins.
Enfin elle cessa. Quelque plat de potage,
Quelque os, par préférence, à quelqu'un d'eux donné,
Fit que l'autre parti s'en vint tout forcené
               Représenter un tel outrage.
J'ai vu des chroniqueurs attribuer le cas
Aux passe-droits qu'avait une Chienne en gésine (2).
               Quoi qu'il en soit, cet altercas
Mit en combustion la salle et la cuisine ;
Chacun se déclara pour son Chat, pour son Chien.
On fit un règlement (3) dont les Chats se plaignirent,
               Et tout le quartier étourdirent.
Leur Avocat disait qu'il fallait bel et bien
Recourir aux arrêts. En vain ils les cherchèrent.
Dans un recoin où d'abord leurs Agents les cachèrent,
               Les souris enfin les mangèrent.
Autre procès nouveau. Le peuple Souriquois
En pâtit : maint vieux chat, fin, subtil, et narquois,
Et d'ailleurs en voulant à toute cette race,
               Les guetta, les prit, fit main basse (4).
Le Maître du logis ne s'en trouva que mieux.
J'en reviens à mon dire. On ne voit sous les cieux
Nul animal, nul être, aucune créature,
Qui n'ait son opposé ; c'est la loi de Nature.
D'en chercher la raison, ce sont soins superflus.
Dieu fit bien ce qu'il fit, et je n'en sais pas plus.
        Ce que je sais, c'est qu'aux grosses paroles (5)
On en vient sur un rien, plus de trois quarts du temps.
Humains, il vous faudrait encore à soixante ans

               Renvoyer chez les Barbacoles(6) .


La fable qui suit trouve sa source chez Haudent (XVIème siècle).
." Les premiers vers de la fable font de cette guerre entre espèces naturellement ennemies un "miroir" de la discorde universelle qui régit l'ordre du monde" (M.Fumaroli)

 

 

 

 

(1) brouillés ensemble, selon une façon de parler
proverbiale tirée du Palais.
(2) sur le point de mettre bas
(3) une loi
(4) les tua toutes
(5) querelles
(6) "terme plaisant et burlesque pour désigner un maître
d'école, qui, pour se rendre plus vénérable à ses écoliers,

porte une longue barbe" (P.Coste, 1743)
illustration François Chauveau
illustration François Chauveau

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